DAVID VERGER Un tas de paille, une écuelle, un mouton, un lapin, comme s'il suffisait de peu de chose pour que nàisse la peinture... Pour David Verger, le sujet n'est qu'un prétexte, la « ressemblance » n'est pas la finalité recherchée, I'essentiel est l'acte pictural. Qu'attend-il alors de ces heures passées à l'atelier à inonder les toiles de liquides colorés, à éponger, gratter, révéler ou effacer ? Peut-être une raison d'étre au monde, de le comprendre et de participer à l'incessant mouvement créateur de l'univers. Sans doute est-ce pour cette raison que chacune de ses toiles, chacun de ses sujets porte une dualité symbolique: la tendresse se mêle à la violence, le familier à l'effroi, le corps à son ombre fantomatique et la plénitude à la disparition. L'évidence n'est pas de ce monde. Le cercle nu de la coupelle des débuts a été remplacé par la boule de laine plus rassurante, l'objet par l'animal, la matière inerte par la chair. L'il regarde, les narines soufflent, le pelage ondule et le volume suggéré par les jeux d 'ombre et de lumière naît de ce fort désir d'une présenc corporelle. L'intensité de l'appel n'exclue pas le trouble, le face-à-face réste problématique car dans le regard de l'autre, dans son isolement au cur de la toile tendue ou de la feuille, c'est le mystère de sa propre condition que surprend le pigment sont des larmes de souffrance autant que de joie, la caresse devient griffure puis réconforte à nouveau lorsque le juste équilibre sera trouvé entre plaisir et peine, présence et absence, vie et mort. D'un point de vue graphique, un semblable combat se joue entre précision et suggestion, tâche et trait, maîtrise et accident, violent clair-obscur ou subtils camaïeux. L'apparente stabilité finalement obtenue sur la toile ou le papier n'est pas à ce moment ultime le reflet de l'âme du peintre que rien ne parvient à apaiser. Une nouvelle uvre est alors nécessaire, une nouvelle quête de plénitude idécle, une nouvelle raison de traverser la journée. Ainsi s'enchaînent les images. Continuel mouvement créateur générateur de « séries » qui puisent leur source dans l'univers familier du jeune homme, la campagne qui l'entoure et dont il ne pourrait se passer, autant que dans l'héritage culturel dont tout artiste contemporain dispose. De la Bible à Saint-Exupéry, de Albrecht Dürer à Barry Flannagan, I'amateur d'art et de références peut revisiter des siècles de création depuis les silhouettes proposées par l'artiste. Chacun des animaux choisis n' est pas naturellement seul, la multitude lui est associée et son soudain isolement intensifie l'étrangeté de ces représentations à priori « banales ». Un tel qualificatif saurait-il s' accorder à la singularité de la moindre parcelle de vie ? La magie de la représentation n'est-elle pas le quasi reflet de celle de la venue au monde? Le mystère de la première palpitation, du premier souffle et la violence de son inévitable disparition semblent au cur du propos du peintre qui nous présente sans relâche des silhouettes émergeant une à une de surfaces presque vierges. La tâche devient dessin, la coulure vibration, la souillure indice de vie et l'animal familier apparaît aussi troublant au'une icône. Sophie de BOURGUES lien: http:// www.adebs.org
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